Ciné-Festival en Pays de Fayence

Pia Marais

Née à Johannesbourg en Afrique du Sud, Pia Marais vit aujourd’hui en Allemagne.

Filmographie
2006 : August und alles danach
2007 : Trop libre
2008 : 3 Histoires de famille
2010 : A l’âge d’Ellen
2013 : Layla Fourie

Layla Fourie est une femme foncièrement honnête. Elle est persuadée qu’une telle honnêteté est nécessaire -et possible. Elle s’est formée comme polygraphiste pour travailler avec des détecteurs de mensonge et est envoyée pour sa première mission. Élevant seule son fils, elle est obligée de l’emmener. En route, elle renverse quelqu’un. Elle veut lui porter secours, mais la victime meurt sur la route vers l’hôpital. Si elle se dénonce, qui s’occupera de son fils ? Commence alors un chassé-croisé entre les personnages, entre mensonges, peurs et méfiance, d’autant que Layla devient la suspecte numéro un de cet accident qui est qualifié de meurtre par la police.
La réalisatrice explique qu’elle est partie d’une enquête sur le besoin sécuritaire en Afrique du Sud. La frontière passe aujourd’hui moins entre Blancs et Noirs qu’entre riches et pauvres, même si les deux se recoupent en grande partie. Les riches se calfeutrent derrière des murs et des barbelés et ne reculent devant rien pour se protéger des pauvres qui, eux, n’ont d’autre alternative pour sortir de leur pauvreté que de verser dans la criminalité. Cela produit un état constant de méfiance de tout le monde envers tout le monde. C’est pourquoi les détecteurs de mensonges font tellement fortune dans ce pays : ils sont utilisés pour le moindre entretien d’embauche, aucun employeur se risquant à faire confiance à un futur employé sans être sûr que ce dernier ne lui cache rien -avec tout ce que cela comporte d’abus de pouvoir potentiels. Même certains couples font appel à ce genre de procédé pour se rassurer avant le mariage? Le phénomène est d’autant plus inquiétant que ce secteur est largement privatisé.
Rayna Campbell incarne remarquablement bien cette tension douloureuse qui se retourne ici contre elle-même.
La fin plaide pour la primauté de la vérité sur les arrangements personnels et n’est pas sans rappeler Secrets et mensonges de Mike Leigh. Sera-ce suffisant pour restaurer la confiance entre Sud-Africains ? On peut en douter tant la méfiance et la peur semblent régner dans ce pays. Mais sans doute est-ce là le seul chemin pour se réconcilier avec soi-même, et seuls des individus réconciliés avec eux-mêmes sont capables de construire un avenir de paix. La force du film réside dans le fait de se concentrer précisément sur cette étude psychologique plutôt que sur une analyse globale de la société. Du coup, le personnage central devient palpable dans toute sa complexité.
Un regard sur l’Afrique du Sud depuis l’intérieur, loin des clichés et de la focalisation sur la seule Apartheid, sobre, et pourtant plein d’émotion.

Layla Fourie

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